À l’occasion de la sortie de son deuxième album, Joypark, Maxence Lemaire, aka Løyd, s’est confié à nous sur sa création, ses influences et le monde qui l’entoure… Un monde en évolution permanente, à la fois terrifiant et fascinant.
Joypark, à la première écoute, on sent que c’est le digne successeur de A Post-Apocalyptic Modern Art Gallery, ton premier album. Mais finalement, c’est quoi la différence entre les deux ?
Maxence: C’est vrai, Joypark c’est un peu le Chapitre 2. Il est clairement rattaché au premier, mais il est plus violent, on ose des sons plus saturés, plus intenses, plus volcaniques. Avec seulement huit titres, on vit une expérience viscérale et violente, avec un visuel associé. C’est court mais dense.
Personnellement, le titre Joypark m’a ramené à l’univers de Stephen King. Quelles ont été tes influences, pourquoi avoir choisi ce titre ?
Løyd : En fait, je me suis plutôt inspiré de l’univers de Banksy. Son parc « anti-amusement » Dismaland est un peu l’anti-thèse de Disneyland, bourré de cynisme et très actuel. J’ai voulu renvoyer un peu la même chose avec Joypark, en mettant en avant cette dualité entre l’entertainment et ce qui ne va pas dans le monde actuel.

Autrement dit, ton propre style se détache, sombre et critique mais quand même accessible avec des chansons plus catchy. Comment as-tu orchestré tout ça ?
Løyd : Les morceaux ne se ressemblent pas, plusieurs émotions co-existent. J’avais envie de créer quelque chose d’agréable, pas seulement une succession de sons très durs mais permettre de faire une pause dans cette demi-heure assez intense. Under The Bed se détache particulièrement à ce niveau-là. Cela permet de souffler un peu.
Est-ce qu’on peut parler de morceau emblème, plutôt là pour attirer le public ?
Løyd : En fait, je suis plutôt ultra égoïste en musique. Je fais ce que j’aime, avec ma propre signature sonore. J’essaie de m’affranchir des tendances actuelles. Ma musique c’est un peu le reflet de ce que j’écoute. Mais dans le même temps, j’ai envie que ça dure, et la question risque de se poser. Si je fais tout le temps du saturé, ça peut devenir redondant. C’est un questionnement permanent.
Encore une fois, les thèmes abordés sont assez percutants et actuels. Est-ce que c’est ton expérience personnelle qui te dirige là-dedans ?
Løyd : J’ai un regard très critique sur cet album. Tout a démarré durant le premier confinement, où l’on se demandait si on devait confiner ou non, mettre les gens en danger pour faire perdurer l’économie… Ce débat m’a énormément marqué, et les images de la Lombardie à l’époque en ont rajouté une couche. Ça a été la genèse de Kerkhof par exemple. Tout est lié à l’actualité, Boys in Blue nous ramène à Georges Floyd, de l’autre côté de l’océan. On n’a pu assister à ça qu’à travers les réseaux, depuis chez nous alors qu’on était confinés.
Tu es d’ailleurs très critique concernant les réseaux, dans ta musique mais aussi dans ta manière de l’aborder.
Løyd : Mon projet n’est pas très « social media friendly ». Je ne vais pas faire ma promo sur TikTok avec une petite danse à la mode. C’est difficile de percer comme ça, il faut toujours trouver quelque chose de super catchy, et même ceux qui réussissent dans la musique ont de plus en plus de mal à s’y retrouver. Tout est dans les mains d’algorithmes, qui peuvent régulièrement se tromper. Les voix commencent à s’élever à ce sujet, je pense qu’on peut changer… Flume par exemple a renvoyé ses auditeurs vers son Discord, et c’est sympa de voir de gros calibres se lever contre cette manière de fonctionner. C’est possible que j’ouvre mon propre Discord par la suite, pour pouvoir échanger sans dépendre de tout ça.
C’est une manière pour les artistes de promouvoir autrement, via les NFT notamment.
Løyd : Sur Discord, il y a en effet une très grande communauté NFT. J’ai réalisé le clip de Boys in blue à la première personne, une sorte d’expérience immersive dans une attraction, avec différentes scènes sur les violences policières. J’en ai isolées six, pour en faire des vidéos carrées avec un beat remixé pour les proposer sous forme de NFT. En gros c’est une sorte de loop de 15 secondes dont les gens peuvent devenir propriétaires. 10% des recettes seront remis à Legacy of war, qui soutient les victimes de guerre. C’est encore une fois d’actualité…
Dans cette dynamique, tu as d’ailleurs réalisé un stream dans le métaverse, et tu es le premier artiste belge à le faire. Raconte-nous cette expérience.
Løyd : J’ai rencontré deux femmes qui possèdent une boite de nuit dans le métaverse. Elles m’ont proposé de jouer, et ça a été un petit challenge technique pour moi. Il fallait encoder pas mal d’informations, ce n’était pas facile mais ça a bien fonctionné. Quelques 200 personnes étaient présentes, et les organisatrices m’ont même parlé d’un petit record d’affluence.
Affluence qu’on espère retrouver lors de live en présentiel, à Arlon le 18 mars ou encore à Liège le 24 mars. Autant vous dire qu’on y sera !