Si le dernier album d’Arctic Monkeys marquait un virage clivant pour la formation anglaise, The Car, le second opus du même style, en dit plus sur les intentions futures d’Alex Turner et de sa bande envers nos tympans. En est-on pour autant convaincu ?
Sur l’ouverture lancinante de leur single There’d Better Be A Mirrorball, nous avons très vite compris que la suite logique de Tranquility Base Hotel and Casino était sortie. Batteries feutrées, Hammond ou Rhodes, il est bien loin le temps des guitares qui font claquer les Vox. Le groupe a changé de voie, a pris une route plus calme, moins de dépassement, et un plus bel horizon. L’odeur de cuir vient nous ouvrir les narines pendant que l’autoradio chauffe doucement en nous faisant parvenir les différents beats 70’s de ce nouveau projet. Ressuscitant Eliott Smith, rappelant Portishead, les rythmiques sont vintages, les guitares wah-wah et une basse Motown accompagnée de petits orchestre à la Phil Spector, nous sommes embarqués. Une trentaine de minutes de route pour un album où, après avoir apprécié le paysage, nous sommes parfois pris de nausée dans les tournants trop brusques. Body Paint, un morceau à plusieurs facettes qui est un bel exemple de cet album paradoxal rempli à ras bord de … pas grand-chose. Les chansons se suivent, se ressemblent, à un tel point qu’il est dur de trouver un titre à ressortir de cette tentative. Le groupe, ou plutôt Alex Turner, se fait clairement plaisir sur l’ensemble du projet, Perfect Sense étant sans doute le plus bel exemple, mais sans jamais trouver la destination finale de ce disque.
Ni revival, ni novateur, The Car n’est pas un crash total. La production entre minimalisme et grand drame apporte un contraste particulier mais peu maitrisé. Entre poésie, pop art des 70’s, bande originale, le mélange est épais. I Ain’t Quite Where I Think I Am, et bien nous non plus Alex, nous cherchons encore… Non Artic Monkeys ça n’était pas mieux avant, c’était tout simplement différent. Nous avons maintenant des trentenaires endurcis qui ont remplacé les gamins qui faisaient sauter Glasto’ avec Brianstorm, le tout avec une énergie nouvelle de quarantenaire. Parce que là est le soucis du projet, si les influences sont profondément assimilées, la formation nous propose des morceaux sans excitation, rappelant la musique d’ascenseur qu’on a pu entendre de leur si tranquille hôtel… Sachant que les singes seront de sortie en tête d’affiche du prochain Rock Werchter, il est légitime de se demander comment Do I Wanna Know ? flirtera dans la même setlist avec Mr Schwartz dans une plaine bondée à 22h…Cet album aurait en tout cas mérité d’être défendu dans des salles plus intimistes afin de mieux y comprendre ses subtilités mais étant donné la renommée du groupe, il est logiquement peu probable que cette idée voit le jour, sauf exception…
Comme vous avez donc pu le remarquer, The Car est peut-être un pari contre la montre, une pépite cachée qui vieillira comme un bon vin. Mais à l’heure actuelle, pour nous la voiture à déjà bien dérapé… Trop riche d’influences diverses, trop poli, trop propre, l’évolution de la formation de Sheffield a le mérite d’être intéressante et assumée mais manque de puissance, sonnant comme un long exposé de mentors et d’idées. Arrivé à destination, mais pas pour autant transporté…
